En ce mardi 26 novembre de l’an de grâce 2019, je me rend à la mairie pour faire refaire ma carte blanche qui arrive bientôt à expiration. (Pour ceux qui ne sont pas nantais ou qui n’auraient pas encore connaissance de son utilité, c’est une carte donnant accès à des tarifs très réduits dans un certain nombre de lieux culturels et sportifs de la ville de Nantes pour les personnes ayant de faibles revenus.) Avant d’y aller, j’imprime mon attestation de droits de la CAF, je récupère mon avis d’imposition et je vérifié bien évidemment que j’y ai encore droit. C’est donc relativement de bonne humeur que j’entre à la mairie, prend mon ticket et attend que l’écran magique annonce mon numéro. J’ai de la chance, je suis appelée seulement quelques minutes après m’être installée dans la salle d’attente.
C’est toute souriante que je dis alors bonjour à la dame qui m’accueille et alors que je vais pour sortir les documents, elle me demande si je suis étudiante. Je lui donne une réponse positive – car je le suis – mais que n’ai-je dont pas fait là ! La gentille fonctionnaire m’annonce le plus simplement du monde que les étudiants ne peuvent pas bénéficier de la carte blanche, car ils ont déjà accès à un certain de nombre de réductions. Je ne me démonte pas pour autant, et toujours poliment – bien que peut-être légèrement moins souriante – je tente de lui expliquer que les réductions sont bien loin d’être les mêmes et que j’ai beau être étudiante, mes documents prouvent que j’y ai droit au vu de mes revenus. La pauvre femme ne faisant qu’appliquer les ordres de ses supérieurs, elle ne peut pas grand chose pour moi et essaie malgré tout de m’aider en me proposant un tarif réduit pour un club de sport, mais ce n’est pas vraiment ce dont j’ai besoin. Je ressors donc bredouille de la mairie et quelque peu abasourdie par la scène que je viens de vivre.
Que retenir de cet échange ? Simplement que les étudiants ne sont pas considérés comme des personnes pouvant être en situation précaire voir de pauvreté et avoir de faibles revenus, alors que les informations nous ont clairement prouvé le contraire il y a encore quelques jours. J’aimerais aussi m’attarder sur les réductions auxquelles les étudiants ont droit : elles donnent en effet accès à des prix qui sont certes en deçà des pleins tarifs mais restent tout de même bien plus onéreux que ceux accordés aux porteurs de la carte blanche dans la majorité des lieux. Prenons par exemple le cinéma Gaumont qui fait payer aux étudiants 8,10€ la séance contre 6,50€ pour les détenteurs de la carte blanche, une journée aux Utopiales coûte 8€ dans un cas, 3€ dans l’autre et le prix d’un billet pour un spectacle au Lieu Unique passe de 12€ à 5€. J’ai volontairement pris trois lieux et manifestations auxquels je me rends régulièrement et dont je vous parle assez souvent sur le blog afin de parler de ce que je connais.
J’ai personnellement la chance aujourd’hui de pouvoir assister à certains spectacles gratuitement et d’en plus pouvoir parfois en faire profiter mes proches, mais je sais que c’est loin d’être le cas de tout le monde. Le non-accès à la culture n’empêche pas de vivre me direz-vous, et j’aurais du mal à vous contredire. Cependant, les écoles et universités demandent aux étudiants une certaine curiosité et ouverture d’esprit et de se rendre plus ou moins régulièrement à certains événements ou dans des lieux publics afin d’étoffer leurs connaissances et d’étayer leur esprit critique sur ce qu’ils apprennent. L’accès aux études supérieures est là encore effectif sur le papier mais bien moins dans la réalité, ne donnant pas la même chance à chacun d’entrée de jeu.
Un étudiant pauvre ne l’est pas moins parce qu’il est jeune ou qu’il a accès à une bourse. J’ai vécu à certains moments de ma vie étudiante avec moins de 200 € par mois pour subvenir à mes besoins après avoir payé mon loyer, ce qui correspond à la nourriture, l’habillement, les fournitures scolaires, les sorties et les loisirs. Cette étape n’est bien heureusement pour moi plus qu’un souvenir aujourd’hui, mais je côtoie tous les jours des étudiants qui se demandent s’ils vont être en capacité d’accéder à un master et surtout de pouvoir le valider et acquérir les connaissances nécessaires en étant obligés de travailler tous les week-ends. Je ne suis pas sûre que les laisser se renfermer sur eux-mêmes soit la solution et je pense qu’une sortie culturelle de temps en temps pour se changer les idées fait même un bien fou.
J’ai toujours soutenu la ville de Nantes dans ses démarches et ses efforts pour donner accès à la culture au plus grand nombre et particulièrement à tous ceux qui en sont éloignés. La carte blanche a vu le jour dans ce cadre là et c’est un dispositif génial dont je suis très heureuse d’avoir pu profiter pendant tout ce temps, quand j’étais enfants et pendant une partie de ma vie étudiante. Je souhaite juste que la ville puisse prendre conscience du non-sens de cette restriction et que cette information circule auprès du plus grand nombre. Merci de m’avoir lue jusqu’ici et je reste disponible pour échanger sur le sujet dans les commentaires de cet article, dans mes DM Instagram ou encore par mail.